La famille Pagès, originaire de la petite paroisse de Polminhac dans le Cantal, a profité du contexte favorable de la fin du XVe siècle pour accélérer son ascension au sein de la société d’Ancien Régime. Ses origines paysannes et marchandes ont vite laissé la place à des activités jugées plus honorables. En effet, à l’image de nombreux riches paysans, les membres de cette famille se lancent dans une carrière juridique ou financière. Ils rejoignent ainsi cette catégorie des ” officiers moyens” mise en lumière par différents chercheurs. Cette ascension sociale s’illustre par un comportement ambitieux et un style de vie proche de la noblesse. Ainsi, les Pagès font l’acquisition du château de Vixouze au tout début du XVIIe siècle et s’installent définitivement à Aurillac o๠ils briguent les places de consuls. Si leurs charges au présidial leur offrent considération et prestige, les terres patiemment assemblées autour de Vixouze leur permettent de jouir de revenus conséquents. Ils entament des travaux qui embellissent et rendent leur château plus confortable. Des réceptions et des événements y sont organisés, accueillant l’élite de la société aurillacoise. On apprécie leur table pour la qualité et la diversité des produits et des mets. L’hôtel particulier n’est pas en reste ; richement meublé, il abrite la famille durant les saisons les plus froides. Cette ascension facilite de nouvelles alliances qui sont, pour la majorité d’entre elles, issues du monde de la magistrature, voire de la noblesse locale. La famille Pagès est bien ancrée dans la ville et ses alentours : juge officiant dans la cité, propriétaire de terres aux environs immédiats, garçons scolarisés au collège jésuite et filles placées au sein des monastères les plus en vue. Au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle, les Pagès de Vixouze accèdent à un nouveau grade dans cette longue ascension sociale. L’intendant du roi choisit l’un d’eux comme subdélégué dans l’élection d’Aurillac. Désormais, la famille pourra compter sur un soutien potentiel de poids : le représentant du roi dans la généralité d’Auvergne. Rien ne semble pouvoir freiner une telle ascension, ni les cabales, ni les critiques qui accompagnent une telle évolution. Les alliances conclues avec les meilleures familles, même si elles grèvent le budget familial, laissent espérer un grand destin pour le dernier représentant des Pagès. La mésentente entre Antoine et son fils François-Xavier au sujet du mariage de ce dernier freine cet élan. François-Xavier désobéit à Antoine et quitte la ville avec sa future épouse. Son retour à Aurillac, auprès de son père, ne lui apporte ni le pardon, ni la fortune ni même l’aisance espérée. François-Xavier dépense plus qu’il ne doit et emprunte plus qu’il ne peut rembourser. Peu de temps avant la Révolution, au bord de la faillite, il doit se séparer définitivement de l’ensemble de ses biens, dont le château de Vixouze, et marier précipitamment son unique fille. Les événements révolutionnaires lui offrent l’occasion de mettre sa plume au service d’une cause. Il s’exerce alors à de nouveaux genres d’écriture, tels que le journalisme et le roman au travers desquels il défend des positions radicales et jacobines. Après son divorce, il quitte définitivement Aurillac et se consacre essentiellement à l’écriture jusqu’à la fin de sa vie. Après s’être séparé de l’hôtel particulier aurillacois, sa fille Catherine-Rose-Euphrasie habitera exclusivement le château de Vixouze jusqu’à près de 80 ans, âge de son décès en 1851. La famille Pagès de Vixouze, au travers de son parcours, a marqué la vie des Aurillacois et a laissé derrière elle, grâce à son château, une empreinte encore bien présente, véritable rempart à l’oubli.